Gustav Stresemann (né le
10 mai 1878 à
Berlin - décédé le
3 octobre 1929 à
Berlin) est un homme politique allemand. Après avoir été
Chancelier du Reich et ministre des affaires étrangères de 1923 à 1929, Stresemann a permis à l'
Allemagne de retrouver un poids diplomatique et économique perdu après la Première Guerre mondiale en mettant en oeuvre une politique pragmatique.
Naissance d'un homme politique
Enfance et études
Gustav Stresemann naît le 10 mai 1878 à
Berlin au 66 de la Köpenicker Straße. Son père, Ernst Stresemann, est cafetier et possède un commerce de
Bière, ce qui permet à la famille de vivre de manière relativement aisée. Il est toutefois le seul des cinq enfants du couple à faire des études. A seize ans, Gustav Stresemann entre au Andreas Gymnasium. Il est passionné d'histoire et son professeur, M. Wolff, parle d'une « d'un goût presque maladif pour l'histoire ».
Napoléon compte avec Goethe parmi ses personnages historiques préférés. Il publiera d'ailleurs un essai sur ce thème en 1924 :
Goethe und Napoleon : ein Vortrag.
En 1897, il passe le bac et entre l'année suivante à l'université de Leipzig où il étudie l'Histoire, le Droit public, le Droit international et où il suit des cours de littérature. Influencé par Martin Kriele, il suis également des cours de sciences économiques. Jusqu'en mars 1899, il est le rédacteur en chef du journal de l'université : le Allgemeine Deutsche Universitätszeitung. Deux ans plus tard, il est nommé professeur à Leipzig après avoir fait sa thèse sur le développement du commerce de la Bière en bouteille à Berlin et analysé le problème des grands magasins, ce qui lui attire les moqueries de ses confrères. Ce choix montre toutefois le Pragmatisme dont Stresemann fera preuve dans le futur. C'est probablement dans le quartier où son père travaillait que Gustav Stresemann a commencé à s'intéresser à l'économie.
Industrie et entrée en politique
En 1901, il est assistant de direction dans la fédération des fabricants de chocolat allemands. Il y fait ses premières armes et fonde une usine de sucre libre de tout
Cartel. Il faut préciser qu'à l'époque, l'économie allemande est sous l'emprise des cartels (
BASF,
Krupp ou
Thyssen par exemple). En 1905, il y a 385 cartels en
Allemagne. Stresemann réussit donc un tour de force. Il écrit à ce propos : « Puisse le gouvernement se garder d'étendre le concept de concentration des entreprises ». En 1902, Stresemann devient président-directeur général de l'Union des Industriels (
Bund der Industriellen) pour la région de
Dresden-
Bautzen. Le 21 février de la même année, il en devient le syndic. Peu à peu, Stresemann s'assure une position sociale au sein de l'industrie vers laquelle il se tournera de nouveau en 1912 lorsqu'il perdra son mandat de député. En 1903, il épouse Käthe Kleefeld avec qui il aura deux enfants : Wolfgang et Joachim. Käthe Kleefeld est la fille de l'industriel Adolf Kleefeld, elle jouera dans les années 1920 un grand rôle dans la société berlinoise. Le couple s'installera dès 1910 au 12A de la Tauentzienstraße. Ils y resteront jusqu'en 1923.
De part ses origines, Stresemann a fortement été influencé par la politique. Son père, fervent admirateur d'Eugen Richter était libéral. Sous l'influence du théologien Adolf von Harnack, Stresemann rejoint le groupe protestant des libéraux. Étudiant, Gustav Stresemann a fait partie de plusieurs corporations étudiantes dont Neo Germania à Berlin, Suevia à Leipzig, Normannia à Heidelberg et Palatia à Tübingen. En 1903 son engagement politique se concrétise avec son entrée au Parti Libéral National (Nationalliberale Partei), un parti défendant principalement les intérêts des dirigeants d'industrie. En octobre 1906 il participe au congrès du parti à Goslar. Son intervention est remarquée par Ernst Bassermann qui était depuis 1904 le chef de ce parti. Conseiller municipal de Dresde, Stresemann est élu au second tour député de la circonscription Annaberg-Schwazenberg en 1907. Bassermann ayant des ennuis de santé, Stresemann reprend la direction du parti, on l'appelle alors le « dauphin ». Il s'attire les foudres de l'aile droite son parti en soutenant les mesures sociales. Cette dernière s'opposera à sa réélection à la tête du parti en 1912. Stresemann n'aura de cesse de livrer alors contre ce parti « incessant combat finalement mortel ». Après avoir perdu son siège au Reichstag, Stresemann entreprend plusieurs voyages aux États-Unis et au Canada. En 1912, il participe à un congrès des chambres de commerce organisé à Boston. Les voyages qu'il entreprend avec ses collègues lui permettent de comprendre les mécanismes de production qu'il mettra en oeuvre par la suite en Allemagne. Le 31 mars 1919, il quitte la direction de la fédération des industriels de Saxe, il était entre temps entré en politique.
Débuts dans la République de Weimar
Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, Stresemann n'est pas enrôlé du fait de son mauvais état de santé. Il en profite pour assurer sa position politique. En 1914, il est élu député pour la circonscription Wittmund/Aurich. Il le restera jusqu'à sa mort. En 1917 il est élu représentant et vice président des libéraux nationaux au Reichstag. C'est là qu'il essaie d'obtenir une fusion entre les libéraux nationaux et le Parti progressiste allemand. Stresemann est certain que l'
Allemagne va sortir vainqueur. Il soutient les annexionnistes. En juin 1918, il dit encore : « Jamais nous n'avons eu moins d'occasion de douter de la victoire allemande que maintenant. Si la victoire est emportée, nous devons l'utiliser pour obtenir les garanties réelles nécessaires » . Membre de la Fédération coloniale allemande (
Deutscher Kolonialverein) et de la Société Commerciale américano-allemande (
Deutsch-Amerikanischee-Handelsgesellschaft), Stresemann soutient la politique navale allemande, considérée comme l'un des facteurs de la guerre.
Si la victoire des Alliés assomme Stresemann, l'abdication de l'empereur est pour lui un plus grand choc encore. Stresemann est monarchiste dans l'âme. Il avait envoyé un télégramme pour les soixante ans de l'empereur. Lorsque la république de Weimar est proclamée, le mouvement libéral en Allemagne est profondément divisé. Après avoir échoué dans sa tentative de fusion des libéraux et des progressistes, Stresemann fonde le Deutsche Volkspartei (DVP) le 15 décembre 1918, un parti qui représente les industriels. Lors des élections au Reichstag de 1919, le DVP obtient 4,4%. Un an plus tard, le parti obtient 13,5%. Le DVP fait parti du cabinet Fehrenbach au pouvoir depuis le 21 juin 1920. Comme la plupart des Allemands de l'époque, Stresemann conteste vivement le traité de Versailles. Pour lui, les Allemands sont « traités comme des chiens exclus des peuples de la Terre ». Pour lui, les clauses morales du traité de Versailles sont bien plus dures à supporter que les clauses économiques et territoriales. Bien que Stresemann refuse le traité, il n'est pas près à endosser la responsabilité de son rejet car cela aurait conduit inévitablement à la reprise des hostilités. La sauvegarde et la garantie des intérêts allemands ne peuvent être obtenue qu'en s'appuyant sur la situation du moment. Dès lors, Stresemann se rallie par raison à la république et s'engage dans la Realpolitik.
Le chancelier des cent jours
Ruhrkampf et inflation
L'année 1922 est une année difficile pour l'Allemagne.
Raymond Poincaré arrive au pouvoir en France et son attitude anti-allemande détériore la situation. La république de Weimar est assaillie de toutes parts et notamment par les conséquences du traité de Versailles qui lui somme entre autre de livrer une partie des produits de la production du pays. L'Allemagne ne pouvant pas payer ce que l'on exige d'elle, Poincaré décide d'aller se payer lui-même. Le 9 janvier 1923, les troupes françaises et belges occupent la Ruhr. Le chancelier
Wilhelm Cuno décrète la résistance passive, le sentiment national s'accroit. Dans le même temps, Gustav Stresemann est président de la commissions aux affaires étrangères du
Reichstag. Les événements de la Ruhr vont lui ouvrir les voies jusqu'à la chancellerie. La résistance passive coûte énormément (les salaires, les assurances sociales par exemple sont pris en charge par les finances publiques) et fait chuter la valeur du mark.
Le 12 août, Cuno démissionne. Ebert, le nouveau président, nomme Stresemann au poste de chancelier le 13 août 1923. Dans les 103 jours qui suivront, Stresemann va résoudre la plupart des problèmes du moment. Il forme un gouvernement de « Grande Coalition » où le SPD est présent. Stresemann ne voulant pas déclencher de nouveau conflit, il capitule le 23 septembre en ordonnant la fin de la résistance bien qu'il l'ait soutenue auparavant. En novembre 1923, l'Inflation atteint des record. En 1918, un oeuf coutait 0,25 mark. En novembre 1923, il coûte 80 milliards de mark . Stresemann cède aux Français à contrecoeur mais il ne perd pas les intérêts allemands de vue. Le ministre des finances Hans Luther crée la Rentenbank le 15 octobre 1923. Le Rentenmark est mis en circulation. Cette nouvelle monnaie n'est plus gagée sur l'or mais sur la production agricole et industrielle. La réforme monétaire engagée permet à Stresemann de stabiliser l'économie. Le Rentenmark sera remplacé par le Reichsmark le 30 août 1924. Cela a permis l'investissement des pays étrangers en Allemagne. Cependant, le séparatisme constitue le problème récurrent que Stresemann doit pallier.
Séparatisme et tentatives de putsch
Le séparatisme est lié au
Ruhrkampf. En
Rhénanie plusieurs républiques sont fondées comme la république du Haut Nassau, la république du Palatinat, ou la république rhénane. La population s'oppose à ce mouvement, le séparatisme échoue. Toutefois Stresemann a des difficultés à préserver l'unité du pays. En
Bavière, les extrémistes de droite lancent un mouvement de résistance. Stresemann demande au président Ebert de proclamer l'état d'urgence. Le putsch de Hitler le 9 novembre 1923 à
Munich est le point culminant du conflit. Lorsque Stresemann apprend la nouvelle, il se serait exclamé « Finis Germaniae ». La Thuringe et la Saxe sont aux mains des socialistes et des communistes. Stresemann envoie l'armée en Saxe pour rétablir la situation. La SPD et le KPD combattent le chancelier au Reichstag qui présente un
Vote de confiance qui est refusé par 231 voix contre 156. Bien qu'il ait combattu l'inflation et préserver l'unité du pays, Stresemann est sommé de quitter le pouvoir le 23 novembre 1923. On lui reproche ne n'avoir pas traité la Thuringe, la Saxe et la Bavière de la même manière, en n'envoyant pas par exemple l'armée en Bavière. Le SPD arrive au pouvoir.
Les gouvernements Stresemann
Premier gouvernement Stresemann (août-octobre 1923)
- Gustav Stresemann (DVP) - Chancelier et ministre des affaires étrangères
- Robert Schmidt (SPD) - Vice-chancelier et ministre de la reconstruction
- Wilhelm Sollmann (SPD) - Ministre de l'Intérieur
- Rudolf Hilferding (SPD) - Ministre des Finances
- Hans von Raumer (DVP) - Ministre de l'Économie
- Heinrich Brauns (Zentrum) - Ministre du Travail
- Gustav Radbruch (SPD) - Ministre de la Justice
- Otto Gessler (DDP) - Ministre de la Défense
- Anton Höfle (Zentrum) - Ministre des Postes
- Rudolf Oeser (DDP) - Ministre des Transports
- Hans Luther - Ministre de l'Agriculture
- Johannes Fuchs (Zentrum) - Ministre des zones occupées
Second gouvernement Stresemann (octobre-novembre 1923)
- Gustav Stresemann (DVP) - Chancelier et Ministre des affaires étrangères
- Wilhelm Sollmann (SPD) - Ministre de l'Intérieur
- Hans Luther - Ministre des Finances
- Joseph Koeth - Ministre de l'Économie
- Heinrich Brauns (Z) - Ministre du Travail
- Gustav Radbruch (SPD) - Ministre de la Justice
- Otto Gessler (DDP) - Ministre de la Défense
- Anton Höfle (Z) - Ministre des Postes
- Rudolf Oeser (DDP) - Ministre des Transports
- Gerhard Graf von Kanitz - Ministre de l'Agriculture
- Robert Schmidt (SPD) - Ministre de la reconstruction
- Johannes Fuchs (Z) - Ministre des zones occupées
Changements
- Le 3 novembre 1923, Sollmann, Radbruch et Schmidt démissionnent. Sollmann est remplacé par Karl Jarres (DVP). Les autres n'ont pas été remplacés.
La Kriegsschuldfrage
La
Kriegsschuldfrage est aussi l'un des thèmes auxquels Stresemann a du se confronter. S'il accepte de travailler avec les Alliés, il n'oublie pas les intérêts allemands, matériels et moraux. Le 2 septembre 1923, il prononce un discours à Stuttgart dans lequel il affirme : « Nous pouvons nous soumettre à un jugement impartial en ce qui concerne la responsabilité dans la guerre, mais nous devons refuser toute sentence rendue sans écouter l'accusé et pour laquelle les parties sont juges ». Le 25 octobre suivant, il aborde de nouveau le sujet à la Haye où il souligne la bonne volonté de l'Allemagne qui a souvert ses archives et qui réclame l'intervention d'une cour de justice internationale. Lorsqu'il quittera ses fonctions de chancelier pour endosser celles de ministre des affaires étrangères, Stresemann continuera à aborder ce thème dans les différents discours qu'il tiendra. Dans le discours appelé
Gambrinusrede qu'il tient le 21 septembre 1926 à
Genève, il affirme que l'Allemagne n'est pas le responsable moral de la Première Guerre mondiale : « Quand on nous reproche d'être les responsables moraux de la guerre mondiale, nous disons : nous ne le sommes pas ». Les mêmes arguments reviennent comme un leitmotiv le 2 octobre 1926 au congrès du DVP à
Cologne, le 26 mai 1927 à Stuttgart. Même lorsque les relations internationales sont détendues, Stresemann n'hésite pas à aborder le sujet de la responsabilité dans la guerre. Il est interviewé par le journal
Le Matin le 23 septembre 1927. Stresemann revient encore sur l'accusation morale faite à l'Allemagne en soulignant que le peuple souffre beaucoup de cette accusation et en mettant l'accent sur la politique de paix mise en place.
Le ministre des affaires étrangères
Locarno et Aristide Briand
Lorsqu'il est nommé ministre des Affaires étrangères le 30 novembre 1923, Stresemann refuse mais il revient sur sa décision peu de temps après. Le premier succès politique du ministre est d'avoir signé les
Accords de Locarno. Stresemann dira lors des actes de conclusion : « Locarno ne sera pas la fin mais le début d'une période de cohabitation plein de confiance entre les nations ». La situation politique en Europe s'était apaisé. En
France, Poincaré a été remplacé en 1924 par
Edouard Herriot qui était assez germanophile. Les accords de Locarno sont le premier pas du rapprochement de l'Allemagne avec les autres pays européens. Signés le 16 octobre 1925, ils garantissent les frontières occidentales de l'Allemagne. L'entrée de l'Allemagne à la Société des Nations est évoquée. Stresemann renonce à l'Alsace-Lorraine. Il aurait également pouvoir recouvrer les territoires de l'est, la frontière orientale est au centre de ces préoccupations. Les accords signés par Stresemann assurent l'invulnérabilité des frontières et non leur intangibilité, ce qui laisse possible une révision des frontières au profit de l'Allemagne.
Le patriotisme de Stresemann aurait pu compromettre le bon déroulement de la signature des traités. Le 9 septembre 1925, il parle en effet dans une lettre adressée au Kronprinz de « finasser ». Ce mot lui sera souvent reproché et il sera accusé de double langage. Aristide Briand, le ministre des affaires étrangères français, se lie d'amitié avec Stresemann avec qui il fera progresser le rapprochement franco-allemand. Malgré leurs origines sociales différentes, Briand fait partie de la bourgeoisie, les deux hommes constatent que la paix en Europe dépend des relations entre leurs deux pays. Le 19 août 1929, Stresemann envoie une lettre à Briand dans laquelle il lui écrit : « En prônant l'idée de prestige, beaucoup de malheur est tombé sur le monde ». Les deux hommes sont des hommes de compromis. Ils reçoivent le titre d'« apôtres de la paix ». Le 10 décembre 1926, les deux hommes reçoivent le Prix Nobel de la paix pour les accords de Locarno. Quelques mois auparavant, le 17 septembre 1926, une rencontre secrète entre Stresemann et Briand avait eu lieu dans le village de Thoiry dans l'Ain près de Genève. A l'issue de cette rencontre, connue sous le nom d'accords de Thoiry, Stresemann aurait déclaré « Tout le contentieux France-Allemagne tiendrait dans un verre à liqueur ». Aucune suite ne sera donnée, car le gouvernement français estimera que Briand aurait fait de trop grandes concessions et Stresemann n'était pas soutenu par Hans Luther.
Derniers succès et mort
Stresemann se bat pour que l'Allemagne soit intégrée dans la Société des Nations. Cette intégration constituerait un dernier pas vers l'égalité des droits pour l'Allemagne. « C'est précisément l'article 19 du traité de la Société des Nations qui nous permet de réviser les traités devenus inapplicables. Nous pourrions nous en servir en tant que membre de la Société des Nations ». Stresemann a un double projet. Il veut non seulement rétablir l'Allemagne dans le prestige dont elle disposait auparavant, mais il veut aussi et surtout réviser le Traité de Versailles. Gustav Stresemann signe le
24 avril 1926 le traité de Berlin entre l’
Allemagne et l’URSS. Le 8 septembre 1926, l'Allemagne obtient un siège permanent à la SDN et Stresemann y prononce un discours deux jours plus tard. En décembre un protocole avait été signé, il mettait fin au contrôle militaire allié. Le 27 août 1928, le
Pacte Briand-Kellogg est signé. Il affirme le règlement pacifique des conflits entre les États. La délégation voyage à
Paris et Stresemann est même reçu par Poincaré, ce qui aurait été impensable quelques années auparavant. Stresemann connaît un dernier succès politique : le
Plan Young. Le
Plan Dawes n'avait rien défini en ce qui concerne les réparations de guerre, un deuxième plan était nécessaire. Grâce au Plan Young la durée des réparations est fixée à 59 années. Stresemann obtient dans le même temps que les troupes françaises évacuent la Rhénanie en juin 1930.
Stresemann ne pourra pas voir les conséquences de ses efforts. Il était malade depuis décembre 1927 et il avait déjà eu une légère attaque cérébrale le 6 août 1928. Il meurt d'une autre attaque cérébrale le 3 octobre 1929 à l'âge de 51 ans. Avec sa disparition, la république de Weimar perd l'un de ses hommes politiques les plus doués. Elle perd non seulement un homme politique mais elle perd également l'une des seules personnes qui l'a soutenue. La mort de Stresemann et la crise mondiale marquent la fin de la république et de l'idée européenne. Six mois plus tard, la grande coalition formée par le SPD, le DDP, le DVP et le Zentrum met en place les cabinets présidentiels qui déboucheront quelques années plus tard sur le mandat de chancelier d'Adolf Hitler.
Peu avant sa mort, Stresemann avait dit au diplomate Albert Bruce Lockhart : « Si les Alliés étaient venus me voir une seule fois , j'aurais eu le peuple derrière moi, oui, encore aujourd'hui je pourrais le faire. Mais ils ne m'ont rien donné et les plus petites concessions qu'ils ont faites sont toujours venues trop tard. Ainsi, il ne nous reste rien d'autre que la violence brute. L'avenir est entre les mains de la nouvelle génération et celle-ci, la jeunesse allemande, que nous aurions pu rallier à nous pour la paix et la reconstruction, nous l'avons perdue. C'est cela ma tragédie et votre crime, à vous les Alliés ».
Controverse politique
Le choix fait par Stresemann d'arriver à la révision du traité de Versailles par le biais d'une politique de rapprochement avec la
France a de tout temps fait débat dans le domaine politique comme dans celui de la recherche historique. On peut le qualifier d'Européen de la première heure mais également de nationaliste radical. Ses adversaires conservateurs et nationalistes ont qualifié sa politique de non-allemande et de souple. De plus, la lettre que Stresemann a envoyée à son ami le Kronprinz
Guillaume de Prusse dans laquelle il a esquissé son désir d'exercer une politique de puissance a mené certains historiens des années 1980 comme le Français Raymond Poidevin à dire de Stresemann qu'il était un remarquable opportuniste déployant les armes diplomatiques pour tromper les puissances occidentales, éveiller le sentiment de sécurité pour arriver à faire réviser le traité de Versailles.
On a donc fait à Stresemann le reproche de mener une Politique secrète. Mais Stresemann n'a jamais caché le fait que la révision du traité de Versailles était l'un de ses buts et cela depuis longtemps. Les hommes politiques des autres pays étaient au courant de ses projets. La politique de Stresemann devait déboucher sur des négociations internationales. Basée sur l'économie, cette politique se démarque de celle menée jusqu'alors par l'Empire mais également de celle qu'a mené par la suite Hitler. Elle a en cela un statut autonome et particulier dans l'histoire allemande. Les jugements extrêmes portés à l'encontre de l'ancien chancelier ne tiennent pas compte du fait qu'il s'est toujours tenu à l'écart des extrémismes contre lesquels il a souvent mis en garde. Les recherches actuelles relativisent l'importance de la lettre au Kronprinz et livre de Stresemann une image beaucoup plus nuancée. Joseph Rovan dit de lui : « Ses successeurs n'avaient ni son talent, ni son prestige, et ne suscitèrent pas la même confiance cher leurs interlocuteurs ».
Hommages
- La commune de Thoiry a baptisé sa rue principale en 1972 rue Briand-Stresemann.
- Un costume porte son nom.
- À Berlin l'ancienne Königgrätzer Straße à Kreuzberg a été rebaptisée Stresemannstraße. De nombreuses autres villes allemandes ont leur rue au nom de l'ancien chancelier : Wiesbaden, Francfort-sur-le-Main, Hambourg, Düsseldorf ou Göttingen.
- Un monument en l'honneur de Stresemann a été inauguré dans le parc du château Freienfels à Hollfeld en Bavière.
- Une plaque commérant sa vie a été inaugurée à Long Hanborough dans l'Oxfordshire.
- En 1975, la RFA met en circulation trois timbres représentant trois prix Nobel de la paix allemands, dont Gustav Stresemann.
Liens connexes
- Chronologie de la République de Weimar
- Liste des chanceliers allemands
Liens externes
Bibliographie et sources
Ecrits
- (de)Akten zur Auswärtigen Politik 1918-1945 (ADAP). Serie A 1918-1924, Bd. A Iff., Vandenhoeck & Ruprecht, Göttingen 1982ff.; Serie B 1925-1933, Bd. B Iff., Vandenhoeck & Ruprecht, Göttingen 1966
- (de)Akten der Reichskanzlei Weimarer Republik, Karl Dietrich Erdmann im Auftrag der Historischen Kommission bei der Bayerischen Akademie der Wissenschaften. Die Kabinette Stresemann I und II, 2 Bde., Harald Boldt Verlag, Boppard am Rhein 1978
- (de)Gustav Stresemann, Reden und Schriften. Politik - Geschichte - Literatur 1987 bis 1926, 2 Bd., Carl Reissner Verlag, Dresden 1926
- (de)Gustav Stresemann, Reichstagsreden, Gerhard Zwoch, Verlag AZ Studio Pfattheicher & Reichardt, Bonn 1972
- (de)Gustav Stresemann, Schriften, Arnold Harttung, Berlin Verlag, Berlin 1976
- (de)Gustav Stresemann,Vermächtnis. Der Nachlaß in drei Bänden, Henry Bernhard, Verlag Ullstein, Berlin 1932/33
- (fr)Gustav Stresemann, Six années de politique allemande - Les papiers de Stresemann (traduction de Henri Bloch et Paul Roques). Bd 1. Paris 1932
La République de Weimar
- (fr)Philippe Bouchet, La République de Weimar, Paris (Ellipses) 1999
- (fr)Sandrine Kott, L'Allemagne du XIXème siècle, Paris (Hachette) 1999
- (de)Peter Krüger, Die Außenpolitik der Weimarer Republik, Darmstadt, 1972
- (fr)Joseph Rovan, Histoire de l'Allemagne des origines à nos jours, Paris (Seuil) 1998
Sur Gustav Stresemann
- (de)Georg Arnold: Gustav Stresemann und die Problematik der deutschen Ostgrenzen, Frankfurt a. M. 2000. (ISBN 3-631-36502-0)
- (fr)Christian Baechler, les mondes germaniques. Gustav Stresemann (1878-1929). De l’impérialisme à la sécurité collective. Presses universitaires de Strasbourg, 1996
- (de)Manfred Berg: Gustav Stresemann. Eine politische Karriere zwischen Reich und Republik, Göttingen/Zürich 1992 (ISBN 3-7881-0141-5)
- (en)Manfred J. Enssle: Stresemann's Territorial Revisionism,1980.
- (de)Theodor Eschenburg/Ulrich Frank-Planitz: Gustav Stresemann. Eine Bildbiographie, Stuttgart 1978 (ISBN 3-4210-1840-5)
- (de)Felix Hirsch: Gustav Stresemann 1878/1978, Berlin (Berlin Verlag) 1978
- (de)Andreas Körber: Gustav Stresemann als Europäer, Patriot, Wegbereiter und potentieller Verhinderer Hitlers. Historisch-politische Sinnbildungen in der öffentlichen Erinnerung. Hamburg (ISBN 3-89622-032-2)
- (de)Eberhard Kolb: Gustav Stresemann, Munich 2003 (ISBN 3-406-480152)
- (de)Wolfgang Stresemann: Mein Vater Gustav Stresemann, München, Berlin: Herbig 1979
- (en)Henry Ashby Turner: Stresemann and the politics of the Weimar Republic, Princeton, N. J. : Princeton University Press, 1963
- (en)Jonathan Wright: Gustav Stresemann: Weimar's Greatest Statesman, 2002
Notes et références
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